Inspiration : médicaments dans l’eau des rivières

Interpellée par un article trouvé sur WikiStrike qui a relayé un article de Sciences et Avenir qui a tiré son article du dossier-origine de Méli-mélo du GRAIE (groupe de recherche Rhône-Alpes sur les infrastructures et l’eau)… Me voilà de nouveau en train de travailler avec des pills !! 🙂 …

J’ai ensuite été plus loin dans mes recherches pour confronter les sources et approfondir le sujet avec notamment les sites du ministère de l’écologie (et un rapport officiel rendu sur ce sujet au gouvernement) concernant le développement durable.  Mais force est de constater que malgré un plan national de lutte contre les résidus de médicaments établi par le gouvernement, les choses ne s’améliorent pas et à ce rythme, les poissons risquent d’être effectivement aussi plein de médicaments que le mien sous peu…
"Eau-la-la"

« Eau-la-la »

Ce sujet est assez inquitétant et édifiant… On trouve de plus en plus de résidus de médicaments dans l’eau des rivières et des lacs.

Les conséquences sont déjà mises en évidence sur la faune et la flore, notamment chez les poissons et batraciens dont le sexe et le comportement changent, mais également chez les bactéries qui sont de plus en plus résistantes aux antibiotiques.  Les médicaments sont potentiellement dangereux et ont un revers de médaille… Ce n’est pas parce qu’une chose est invisible qu’elle n’existe pas ou plus et que les conséquences ne sont pas impactantes.

La France est le plus gros consommateur européen de médicament à usage humain et le second consommateur mondial de médicament à usage vétérinaire juste derrière les USA. Aujourd’hui,  force est de constater que les habitudes de consommation – donc de rejet – et de traitement des déchets médicamenteux ne s’améliorent pas et que les solutions sur le terrain, notamment au niveau des usines d’épuration, sont toujours inexistantes. Quand les conséquences sur l’homme seront démontrées par des études, ce sera surement trop tard pour y remédier et bon nombres d’espèces avant l’homme en auront subi les désastreux effets.

Et si, je vois même plus loin, si l’espèce humaine venait à s’éteindre et si la vie devait à nouveau reprendre sur terre à partir des milieux aquatiques, je n’ose pas imaginer l’aspect des nouvelles formes de vie si elles étaient issues de poissons comme le mien… c’est aussi la raison pour laquelle j’ai inclus dans ce poisson des petits bouts de matière réfléchissante (à lire au propre comme au figuré !), car il est plus que nécessaire que l’on regarde en face ce que l’on est en train de faire à la nature, que l’on est en train de se faire, et que l’on réfléchisse pour préserver et respecter enfin l’eau comme le trésor précieux et si fragile qu’elle est.

J’aimerais avec ce tableau toucher le grand public, du particulier à l’éleveur, car une grande partie de la solution est entre nos mains : Consommons moins, consommons mieux, changeons les habitudes et soyons responsables de nos déchets.

L’eau est source de toute vie, nous sommes en train de modifier tous les paramètres de la source… certains diraient de scier la branche…

Quelques points que j’ai relevés dans mes différentes sources :

(Voir schéma, tableaux et développements dans liens en bas de page)
La France est le premier pays consommateur de médicaments au sein de l’Union européenne aussi bien de médicaments à usage humain que de médicaments vétérinaires :

> Consommation de médicaments pour humains :

        • France = 1er marché de l’Union européenne (avec l’Allemagne mais qui a 30 % population en plus)
        • France = 3ème consommateur à l’échelle mondiale derrière les USA et le Japon.

> Consommation de médicaments vétérinaire :

        • France = 1er marché de médicaments vétérinaires de l’Union européenne
        • France = 2ème à l’échelle mondiale après les Etats-Unis. (<< importance de l’élevage français, toutes espèces confondues)

Une étude réalisée par l’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire, en janvier 2011, montre qu’un quart des échantillons d’eau testés contiennent des traces de médicaments (caféine, antiépileptiques et anxiolytiques sont les plus représentés).

 

D’où viennent ces molécules ?

L’origine est multiple :

  • La plus grande quantité provient des excrétas (urines, fèces) des personnes soignées (soit parce que le dosage pris est trop fort, soit parce qu’une partie seulement des molécules thérapeutiques est transformée par voie biochimique)
  • mais également du déversement direct des médicaments non utilisés dans les toilettes, les lavabos, les poubelles, décharges… Sur près de 30 000 tonnes de médicaments non utilisés par an, seules 13 000 tonnes sont récupérées dans les pharmacies. Même si Cyclamed indique que 75% des médicaments non utilisés sont détruits, plusieurs milliers de tonnes sont encore éliminées avec les ordures ménagères et jusqu’à un millier de tonnes est déversé directement dans les toilettes, éviers et poubelles. Que ce soit via les réseaux d’eau usée ou indirectement à travers les sols des décharges, en raison du ruissellement, ces résidus médicamenteux se diffusent dans les rivières comme dans les nappes souterraines.
  • Certains médicaments proviennent également dans une quantité importante des urines ou excréments d’animaux d’élevage (à des fins thérapeutiques, préventives ou pour favoriser la croissance) et se retrouvent dans l’eau soit directement par le biais des excréments animaliers dans le cas du pâturage, soit par épandage du fumier ou des lisiers, soit par le biais de la pisciculture.
  • Localement, les rejets industriels et les rejets hospitaliers peuvent contribuer fortement à la pollution des milieux aquatiques. (eaux de process, eaux de lavage ou de vidange des industrie pharmaceutique / certains médicaments réservés à un usage hospitalier tels que les anesthésiques et les anticancéreux pour lesquels la contribution aux apports environnementaux pourrait être de 40 à 60%)

 

Quelles sont les molécules concernées ?

Environ 3000 substances pharmaceutiques sont utilisées dans l’Union Européenne (La molécule de loin la plus utilisée en France est le paracétamol avec 3300 tonnes par an). Tous ces produits ainsi que leurs produits de dégradation peuvent se retrouver dans l’eau.

  • C’est donc plusieurs milliers de molécules différentes qui sont susceptibles d’agir sur les espèces sensibles : des analgésiques, des antibiotiques, des anti-inflammatoires, des anti-cancéreux, des hormones, etc…
  • Pour les 25% d’échantillons positifs analysés par l’ANSES, les analyses révèlent généralement la présence simultanée d’une à quatre molécules. Hormis la caféine (traceur de présence humaine), les molécules les plus fréquemment retrouvées sont la carbamazépine (un antiépileptique) et son principal produit de dégradation, ainsi que l’oxazépam (un anxiolytique).

 

Ces molécules ne sont pas des substances chimiques anodines : les molécules-mères ont été conçues et fabriquées pour avoir une activité sur la matière vivante. C’est ainsi qu’elles modifient, par leurs propriétés pharmacologiques, les mécanismes biologiques des organismes destinataires (les espèces cibles), leur vocation peut également être de tuer des virus, des bactéries, des champignons, des parasites (protozoaires, helminthes, arthropodes….). Ces molécules-mères et certains de leurs métabolites sont donc susceptibles d’agir sur les mécanismes biologiques d’espèces non-cibles, telles celles de la flore et de la faune habitant le milieu aquatique et le sol et exposées en permanence à ces molécules.

 

les trouve-t-on et à quelle concentration ?

On trouve des résidus de médicaments dans tous les compartiments du cycle hydrologique (urines, eaux entrées et sorties des stations d’épuration, eaux superficielles : lacs, rivières…, eau de consommation) ainsi que dans les sédiments. En pratique, seules quelques dizaines de molécules sont suivies de façon régulière. Mais toutes les familles de médicaments ont été détectées lorsqu’elles ont été effectivement recherchées. Même si les concentrations dans l’eau sont très faibles (Il faut par exemple boire environ 500 000 m3 d’eau potable pour ingérer l’équivalent d’un cachet d’aspirine de 500 mg), il est démontré que certains de ces résidus de médicaments ont des effets mesurables sur différentes espèces aquatiques (en particulier poissons et batraciens).

 

Quels sont les effets sur les espèces (point A) et sur l’homme (point B) ?

A/ Plusieurs études ont mis en évidence des altérations de populations aquatiques reliées de façon certaine à la présence des substances actives dans l’eau, parmi lesquelles :

  • des effets sur la reproduction des animaux (poissons, batraciens, mammifères marins), pouvant aller jusqu’au changement de sexe du à la présence d’œstrogènes. La « féminisation » des poissons, confirment le risque environnemental associé à ces substances, même si les effets observés peuvent résulter de molécules à effets perturbateurs endocriniens qui ne sont pas des médicaments (pesticides, métaux, retardateurs de flamme…). Ainsi la faune aquatique connaît aujourd’hui des diminutions de population importantes.
  • des modifications du comportement de poissons, par exemple des perches rendues plus agressives du fait de la présence d’un antidépresseur (oxazepam) dans l’eau ; etc.
  • des modifications des populations bactériennes, avec en particulier un développement des bactéries résistantes aux antibiotiques, associées à une pression de sélection due à la présence permanente d’antibiotiques dans l’eau
  • certains antibiotiques ont une toxicité même à très faible dose sur les algues vertes et bleues
  • les médicaments anticancéreux sont par nature des molécules très agressives sur les phénomènes biologiques les plus élémentaires, puisqu’ils présentent généralement des propriétés carcinogènes, mutagènes et génotoxiques.(plusieurs médicaments anticancéreux sont d’ailleurs classés cancérogènes avérés pour l’homme !!!!!). De telles molécules sont potentiellement très dangereuses pour la faune et la flore qui leur sont exposées en permanence.

Les interactions possibles avec d’autres polluants déjà présents dans les milieux aquatiques (par exemple chimiques ou pesticides), appelées parfois effet « cocktail », constituent un sujet de préoccupation qui à ce jour n’a pas encore reçu de réponses claires.

Il est  extrêmement difficile d’apporter la preuve formelle de la relation de causalité entre l’exposition aux résidus de médicaments et la dégradation observée des populations d’organismes aquatiques. Tout organisme vivant est exposé en permanence à un grand nombre de substances qui interagissent avec lui-même, mais aussi entre-elles. L’origine de ces substances est très diverse, naturelle ou artificielle, et les résidus de médicaments ne constituent que l’une des pièces du puzzle. Il est donc difficile de séparer l’influence des résidus de médicaments de l’influence des autres polluants. En revanche beaucoup d’effets sont suspectés dans la mesure où les tissus et organes cibles visés par les médicaments chez l’homme ont souvent des équivalents chez beaucoup d’espèces sauvages.

 

B / Les risques pour l’homme sont à la fois directs et indirects.

  • Le principal risque indirect est lié au développement de souches de bactéries résistantes aux antibiotiques. (des mesures ont déjà commencé être prises pour limiter la présence de résidus antibiotiques dans les milieux aquatiques : réglementation, voire interdiction, de leur utilisation comme complément alimentaire dans l’élevage des animaux).

«Des phénomènes comme la résistance de certaines bactéries dans l’environnement, que nous constatons aujourd’hui, sont des signaux. Il est important d’agir dés maintenant. La réussite de ce plan d’action repose sur la prévention, en limitant les rejets médicamenteux, et sur la recherche, pour améliorer les connaissances afin de mieux cerner les impacts sanitaires et environnementaux.», a déclaré en 2011 Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, alors ministre de l’écologie.

  • Les risques directs sont liés à l’exposition chronique de l’homme aux résidus de médicaments, par contact avec l’eau ou par consommation d’eau et/ou de poissons. Il a été démontré que les doses susceptibles d’être ingérées dans le « pire cas » restaient éloignées des doses thérapeutiques. Le risque direct semble donc faible.

 

Malgré tout, des effets toxiques restent possibles du fait du caractère chronique de l’exposition, des risques d’accumulation dans la chaine alimentaire et dans le corps humain et de potentiels effets cocktail. Ce risque est d’autant plus important que l’exposition existe à chaque âge de la vie et que, par exemple les bébés et les enfants peuvent être extrêmement sensibles à certaines molécules.

 

Comment agir ?

Du fait de l’importance relative des sources, il est indispensable de conduire en parallèle différents types d’actions, mobilisant l’ensemble des acteurs et s’appuyant sur des outils et développements réglementaires, technologiques, pratiques et culturels. La vigilance doit être nécessaire et des données fiables, à la fois sur les expositions et sur les impacts sanitaires ou écologiques, sont indispensables.

 

Plusieurs mesures peuvent être préconisées :

  • Que des études soient faites sur les impacts des médicaments et de leurs métabolismes sur les organismes aquatiques. C’est désormais le cas depuis peu, mais uniquement pour les médicaments nouveaux. Et ces analyses ne concernent que les principales molécules actives et non les produits issus de leur dégradation.
  • Que nous limitions notre consommation de médicaments au strict nécessaire en respectant les doses et les moments de prise (optimisation de la métabolisation). Et que nous ne nous débarrassions pas des médicaments inutilisés en les jetant dans sa poubelle, les toilettes ou le lavabo.
  • De continuer à diminuer les rejets d’antibiotiques provenant de l’élevage
  • De renforcer les stratégies visant à piéger (et/ou traiter) des molécules à la source en développant la collecte séparée (en particulier dans certains services des hôpitaux ou dans les établissements industriels de production de médicaments)
  • Que soient développés des procédés épuratoires susceptibles d’arrêter les molécules potentiellement dangereuses dans les stations d’épuration et dans les usines de production d’eau potable.
  • Promouvoir la « pharmacie verte » (exemple : rajouter des groupements chimiques à la molécule active permettant de favoriser sa dégradation).

 

Ces actions utilisées de façon conjointe peuvent diminuer de façon importante les concentrations dans les milieux aquatiques. Elles ne peuvent cependant pas éliminer totalement tous les résidus. 
Si certaines molécules présentent des risques avérés pour la santé publique ou pour la qualité des milieux récepteurs et qu’il est nécessaire de diminuer les concentrations d’un facteur 10 ou davantage, la seule possibilité consiste à limiter la prescription de cette molécule, par exemple en recherchant un produit de substitution. Ceci montre la nécessité de mieux connaître le devenir et les effets effectifs des résidus de médicaments dans l’eau et de rendre des études indépendantes obligatoires non seulement pour toute nouvelle autorisation de mise sur le marché, mais également pour l’ensemble des médicaments existants.

En couverture : Work in progress

 

Liens sources :

Article wikistrike

Article magazine Sciences et Avenir

Méli-Mélo

Le GRAIE

Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, lutte résidus médicaments

Rapport du conseil général de l’environnement et du développement durable

> 1er Plan national pour lutter contre les résidus de médicaments dans l’eau